Amazon fait un pas de géant dans la course à l’intelligence artificielle (IA) avec la construction d’un complexe de centres de données d’une envergure sans précédent dans l’Indiana. Ce projet, baptisé « Project Rainier », marque une nouvelle ère pour l’industrie technologique, où des installations massives redéfinissent les limites de la puissance de calcul et de l’infrastructure énergétique.
Un complexe titanesque pour l’IA
Sur 1 200 acres (environ 4.86km²) de champs de maïs à New Carlisle, dans l’Indiana, Amazon est en train de bâtir l’un des plus grands centres de calcul au monde. Ce campus, qui abrite déjà sept centres de données, chacun plus grand qu’un stade de football, devrait s’étendre à une trentaine de bâtiments dans les années à venir. Ces installations, remplies de centaines de milliers de puces informatiques spécialisées, consommeront 2,2 gigawatts d’électricité – une quantité suffisante pour alimenter un million de foyers.
Ce projet s’inscrit dans une collaboration stratégique avec Anthropic, une start-up d’IA dans laquelle Amazon a investi 8 milliards de dollars. Les centres de données fourniront une puissance de calcul colossale pour développer et déployer des technologies d’IA avancées, destinées aussi bien aux entreprises qu’aux consommateurs.
Une course mondiale à la suprématie de l’IA
Amazon n’est pas seul dans cette quête. L’industrie technologique mondiale est engagée dans une compétition féroce pour construire des centres de données capables de soutenir l’essor fulgurant de l’IA. Meta, par exemple, développe un centre de 2 gigawatts en Louisiane, tandis qu’OpenAI construit des installations de 1,2 gigawatt au Texas et aux Émirats arabes unis. Ces projets, impensables il y a encore quelques années, sont devenus nécessaires depuis l’explosion de l’IA générative, initiée par le lancement de ChatGPT en 2022.
Ces centres massifs repoussent les limites des réseaux électriques et redéfinissent la manière dont le monde conçoit l’informatique. Ils nécessitent des investissements de plusieurs centaines de milliards de dollars et des réseaux complexes de puces spécialisées, comme les GPU (unités de traitement graphique), dont la demande explose.
Une technologie développée sur une décennie
Le projet d’Amazon repose sur une expertise accumulée sur près de dix ans. En 2015, l’entreprise a acquis Annapurna Labs, une société israélienne spécialisée dans la conception de puces. Un an plus tard, l’équipe d’Annapurna a commencé à développer Inferentia, la première puce d’Amazon dédiée à l’IA. Bien que cette puce n’ait pas connu un succès immédiat, elle a posé les bases pour Trainium 2, une puce conçue en collaboration avec Anthropic, optimisée pour les besoins des centres de données massifs comme celui de New Carlisle.
Avantages économiques et controverses environnementales
Pour encourager ce projet, l’État de l’Indiana a accordé à Amazon des allégements fiscaux substantiels : une exonération de taxe sur les ventes pendant 50 ans, potentiellement évaluée à 4 milliards de dollars, ainsi que des réductions supplémentaires sur les impôts fonciers et technologiques. Ces incitations reflètent l’impact économique attendu, avec des investissements initiaux de 11 milliards de dollars pour la construction de 16 bâtiments, un chiffre qui pourrait doubler avec l’expansion prévue.
Cependant, le projet suscite des inquiétudes. Une opposition locale s’est formée autour de la volonté d’Amazon de construire sur une zone humide de 10 acres (0.04km²) au cœur du complexe. Bien que l’entreprise minimise l’importance écologique de cette zone, qualifiée de petite et peu profonde, les défenseurs de l’environnement et certains résidents s’inquiètent des impacts sur la biodiversité locale et de la consommation massive d’énergie et d’eau nécessaire au refroidissement des centres.
Un tournant pour l’avenir de l’informatique
Le « Project Rainier » d’Amazon illustre un tournant majeur dans l’histoire de l’informatique. Les centres de données traditionnels, construits pour gérer le trafic internet, sont désormais éclipsés par ces nouvelles installations conçues pour l’IA. Ces superordinateurs, composés de dizaines de milliers de puces interconnectées, consomment des quantités d’énergie colossales et nécessitent des systèmes de refroidissement avancés pour éviter la surchauffe.
Ce projet reflète également une transformation plus large de l’industrie technologique, où les géants comme Amazon, Meta, Google et Microsoft investissent des sommes astronomiques – plus de 320 milliards de dollars en 2025 – pour dominer le marché de l’IA. Cette course effrénée soulève des questions sur la durabilité énergétique et les impacts sociaux, notamment dans les communautés locales où ces centres s’implantent.
Conclusion : un pari audacieux sur l’avenir
Avec « Project Rainier », Amazon ne se contente pas de suivre la vague de l’IA : l’entreprise cherche à la dominer. Ce complexe de centres de données dans l’Indiana est bien plus qu’une infrastructure technologique ; il symbolise une vision ambitieuse où l’IA redéfinit les industries, les économies et la société.
Source : The New York Times