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jeudi, mai 1, 2025
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Ukraine, Russie, États-Unis : qui contrôlera la centrale de Zaporijjia ?

Depuis le début du conflit russo-ukrainien, la centrale nucléaire de Zaporijjia, la plus grande d’Europe, est devenue bien plus qu’une infrastructure énergétique : un enjeu stratégique et un symbole des tensions internationales. Récemment, la Russie a surpris en se disant prête à discuter d’une éventuelle présence américaine sur le site, dans le cadre d’un règlement du conflit en Ukraine. Mais que se passe-t-il vraiment autour de cette centrale, et pourquoi ce sujet concerne-t-il le monde entier ?

Une centrale sous haute tension

Située dans le sud-est de l’Ukraine, la centrale de Zaporijjia alimentait, avant la guerre, près de 20 % de l’électricité ukrainienne. Depuis mars 2022, elle est occupée par les forces russes, qui en ont pris le contrôle après l’invasion. Les six réacteurs sont à l’arrêt, mais la centrale reste opérationnelle pour éviter une catastrophe nucléaire. Cela nécessite une maintenance constante : alimentation électrique pour le refroidissement, personnel qualifié et protection contre les attaques.

Problème : la centrale est devenue un point chaud du conflit. Des explosions régulières autour du site, attribuées par la Russie à l’Ukraine et par l’Ukraine à la Russie, font craindre un accident nucléaire. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), présente sur place, tente de jouer les arbitres, mais son accès est limité par l’occupation russe. Chaque camp accuse l’autre de jouer avec le feu, et les images de drones ou d’obus près des réacteurs glacent le sang.

Une proposition russe inattendue

C’est dans ce contexte brûlant qu’Alexeï Likhatchev, patron de Rosatom (l’agence nucléaire russe), a fait une déclaration surprenante : la Russie serait prête à discuter d’une présence américaine à Zaporijjia dans le cadre de pourparlers pour mettre fin au conflit. Cette ouverture, qui requerrait l’aval de Vladimir Poutine, intervient après des rumeurs d’un plan américain visant à placer la centrale sous contrôle neutre, peut-être pour fournir de l’électricité à la fois à l’Ukraine et aux territoires occupés par la Russie.

Mais attention, ne nous embalons pas. Cette proposition soulève plus de questions qu’elle n’apporte de réponses. Pourquoi la Russie, qui contrôle fermement le site, ferait-elle un tel geste ? Certains y voient une manœuvre diplomatique pour gagner du temps, tester les intentions américaines ou obtenir des concessions, comme un allègement des sanctions. D’autres pensent que Moscou cherche à légitimer son occupation en impliquant les États-Unis, tout en détournant l’attention des accusations d’attaques sur la centrale.

L’Ukraine dit non à toute concession

Pour l’Ukraine, la position est claire : Zaporijjia est ukrainienne, point final. Le président Volodymyr Zelenskyy a rejeté toute idée de contrôle étranger qui ne respecterait pas la souveraineté de son pays. La centrale n’est pas seulement un atout économique, c’est un symbole de résistance. Kyiv accuse la Russie de mettre la centrale en danger, notamment en limitant l’accès de l’AIEA et en remplaçant le personnel ukrainien par des techniciens russes, souvent sous pression.

Le ministre ukrainien de l’Énergie, Herman Halushchenko, a plaidé pour un soutien international afin de reprendre le contrôle du site, mais sans céder un pouce de terrain sur la propriété. Pour les Ukrainiens, accepter une présence étrangère, même américaine, pourrait être perçu comme une trahison, surtout si cela implique de reconnaître, même indirectement, l’occupation russe.

Les États-Unis dans l’équation

L’idée d’une implication américaine n’est pas nouvelle. Des discussions, notamment sous l’impulsion de l’administration Trump, ont évoqué un rôle des États-Unis pour sécuriser la centrale et garantir son fonctionnement neutre. Cela pourrait renforcer la surveillance de l’AIEA et réduire les risques d’incident, tout en offrant une solution temporaire pour alimenter l’Ukraine en électricité. Mais là encore, les obstacles sont nombreux.

D’abord, une présence américaine sur un territoire occupé par la Russie serait un casse-tête logistique et politique. Ensuite, les États-Unis devraient naviguer entre le soutien à l’Ukraine et la nécessité de ne pas provoquer une escalade avec Moscou. Enfin, le redémarrage des réacteurs, indispensable pour produire de l’électricité, est un défi technique colossal : manque d’eau pour le refroidissement, infrastructures endommagées et pénurie de personnel qualifié rendent l’opération risquée à court terme.

Pourquoi ça nous concerne

Vous vous demandez peut-être pourquoi une centrale à des milliers de kilomètres devrait préoccuper les Français. La réponse est simple : un accident nucléaire à Zaporijjia ne connaît pas de frontières. Un scénario catastrophe, comme une fuite radioactive, pourrait contaminer l’Europe, y compris la France, avec des conséquences sanitaires et environnementales dramatiques. Souvenez-vous de Tchernobyl en 1986 : le nuage radioactif avait atteint l’Hexagone en quelques jours.

De plus, la crise énergétique mondiale, aggravée par le conflit en Ukraine, nous touche directement. Une centrale comme Zaporijjia, si elle était remise en service, pourrait stabiliser l’approvisionnement en électricité de l’Ukraine et, indirectement, soulager la pression sur les marchés énergétiques européens. À l’inverse, sa destruction ou une mauvaise gestion pourrait aggraver les pénuries et faire grimper les prix.

Et maintenant ?

La proposition russe d’impliquer les États-Unis à Zaporijjia ressemble à un coup de poker dans un jeu diplomatique déjà tendu. Entre la méfiance de l’Ukraine, les ambitions russes et les calculs américains, la centrale reste un baril de poudre. Pour l’instant, l’AIEA continue de plaider pour une zone démilitarisée autour du site, mais sans accord global, cette idée reste lettre morte.

Une chose est sûre : la résolution du sort de Zaporijjia dépendra des progrès dans les négociations de paix, si elles ont lieu. En attendant, la centrale reste un symbole des enjeux du conflit : souveraineté, énergie, sécurité mondiale. Espérons que la raison l’emportera, car personne n’a intérêt à jouer avec le feu nucléaire.

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