La suprématie aérienne des États-Unis, longtemps considérée comme incontestable, fait face à des défis sans précédent face aux avancées technologiques chinoises, notamment dans le domaine des missiles à très longue portée et des capacités de frappe de précision.
Selon un rapport du Département de l’Armée de l’Air américaine publié en décembre 2024, les adversaires des États-Unis développent des armes anti-aériennes guidées par des capteurs spatiaux avec des portées dépassant les 1 600 kilomètres. La Chine, en particulier, investit massivement dans des systèmes de précision à longue portée, incluant des véhicules hypersoniques intercontinentaux et un arsenal diversifié de missiles lancés depuis l’air, la terre et la mer.
Une avancée majeure a été révélée en mars 2024 par le South China Morning Post : des scientifiques chinois ont conçu un missile sol-air d’une portée exceptionnelle de 2 000 kilomètres. Développé par une équipe de l’Université Polytechnique du Nord-Ouest sous la direction de Su Hua, ce missile de huit mètres pesant 2,5 tonnes vise spécifiquement les avions de détection avancée et les bombardiers.
Ces développements remettent en question les doctrines militaires traditionnelles. Comme le souligne Marek Gallo dans un rapport Finabel d’octobre 2024, le concept même de supériorité aérienne, pierre angulaire de la doctrine militaire occidentale, devient obsolète face aux systèmes de défense aérienne modernes, aux drones et à la guerre électronique. Le conflit en Ukraine illustre cette évolution, où les belligérants ne parviennent qu’à obtenir des « fenêtres d’opportunité » temporaires plutôt qu’une domination aérienne durable.
La vulnérabilité des bases aériennes américaines dans le Pacifique est particulièrement préoccupante. Tandis que la Chine a doublé ses abris d’avions renforcés pour atteindre plus de 3 000 unités, les États-Unis n’en ont ajouté que deux depuis le début des années 2010. Cette disparité expose dangereusement les bases américaines aux frappes de missiles de précision.
Face à ces défis, J. Michael Dahm du Mitchell Institute for Aerospace Studies préconise une approche multiforme combinant des défenses actives et passives, notamment le concept d’Emploi de Combat Agile (ACE) qui préconise la dispersion des moyens aériens sur plusieurs bases. Sans ces réformes, l’US Air Force risque une paralysie opérationnelle qui pourrait compromettre les intérêts américains et de leurs alliés, menaçant ainsi l’équilibre des forces mondial.
L’horizon 2050 s’annonce particulièrement critique : les bases aériennes avancées et les sites fixes deviendront de plus en plus vulnérables aux frappes de précision continues, nécessitant des changements significatifs dans les stratégies de l’US Air Force. Cette évolution force les États-Unis à repenser fondamentalement leur approche de la supériorité aérienne, passant d’une domination absolue à une capacité plus limitée et situationnelle.
Références de l’article
- The Department of the Air Force In 2050
- Chinese scientists plan surface-to-air missile with 2,000km kill range
- Rethinking the Concept of Air Superiority: From Sine Qua Non Towards Interoperability
- Windows, not Walls: Conceptualizing Air Superiority for Future Wars
- US Pacific airfields highly vulnerable to China’s preemptive attack
- AIR FORCE DOCTRINE NOTE 1-21